« Je suis assez décomplexée par rapport à l’intelligence artificielle »


ChatGPT ne peut pas rédiger un mémoire de master. Du moins, c’est ce qu’il prétend lorsqu’on lui demande frontalement de le faire au cours d’une conversation sur sa messagerie instantanée. Pour expliquer sa décision, le robot conversationnel évoque « l’intégrité académique » et propose à la place conseils, suggestions et corrections. Pourtant, Manon (tous les prénoms des étudiants ont été modifiés), 25 ans, étudiante en master dans une école privée de communication, l’avoue : « Il y a des parties de mon mémoire de recherche intégralement rédigées par ChatGPT. Il a trouvé pour moi des éléments de réflexion supplémentaires et une façon de terminer mon devoir en ouvrant le débat. »

Manon ne serait pas la seule étudiante à avoir eu recours à ChatGPT pour l’aider à rédiger son travail universitaire. D’après une étude, publiée début novembre, de l’institut de sondage Le Sphinx et le logiciel Compilatio, spécialisé dans la prévention de la fraude académique, 55 % des étudiants affirment utiliser un outil d’intelligence artificielle (IA) générative au moins occasionnellement.

Pour Carla, 23 ans, étudiante en intelligence économique dans une école de sciences politiques, c’est une autre raison qui l’a poussée à faire appel à l’IA : « Je suis dyslexique, je n’ai pas une belle plume. Mes phrases sont très longues et incompréhensibles. Alors, j’ai envoyé tous mes paragraphes à ChatGPT, qui me les a réécrits. Il a aussi rédigé la synthèse pour ma bibliographie. » A son mémoire de recherche, Carla a obtenu, fin août, la note de 16 sur 20. Selon elle, impossible d’acquérir ce résultat sans l’aide du robot. « Dans un mémoire de recherche, l’écriture compte pour beaucoup », ajoute-t-elle.

Mais l’étudiante ne considère pas qu’elle a triché. Avant d’utiliser ce nouvel outil, elle avait en amont travaillé une problématique seule, réfléchi à un plan et rédigé une première version. « Je suis assez décomplexée par rapport à l’intelligence artificielle, je l’avais déjà utilisée avant pour des devoirs moins complexes. C’est un outil comme un autre, il va falloir s’y faire. » Carla admet tout de même avoir eu peur au moment de l’envoi du mémoire à son école, mais s’est rassurée en se répétant qu’il s’agissait de ses idées à elle, pas de celles de ChatGPT.

La crainte que les étudiants utilisent l’IA pour les mémoires de recherche et d’alternance s’est installée dans les écoles et universités dès novembre 2022, aux premiers jours de commercialisation de ChatGPT. Très vite, les établissements ont compris que ce nouvel instrument pouvait être utilisé par leurs propres étudiants. Au mois de mars, le robot lancé par OpenAI cumulait déjà 186 millions de comptes. Certaines écoles ont réagi dès le mois de janvier, en interdisant toute utilisation non mentionnée de ChatGPT, à l’image de Sciences Po Paris.

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